2015/09/20 - Homélie - 25e dim. ord.

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Les lectures d’aujourd’hui nous conduisent sur le terrain de la rencontre entre la culture et la foi. Et nous qui venons pratiquement tous de l’étranger, France ou ailleurs, nous sommes bien placés pour savoir combien il est important de savoir bien les distinguer et comme il est difficile de ne pas subir des influences à notre insu, par les données de la foi ou celles de la culture ambiante.

C’est l’expérience qu’ont faite les juifs en Egypte, dont le livre de la Sagesse rend compte. Ce livre écrit en grec, destiné aux juifs de la diaspora dans le milieu grec (au milieu du premier siècle avant J-X), reflète ce débat entre la culture et la foi. Comment vivre sa foi à l’étranger, dans un autre pays, même si l’on parle la même langue ? Que veut dire l’acculturation, est-ce l’acceptation de la culture du pays d’accueil jusqu’à l’abandon des lois et préceptes qui régissaient la vie des croyants dans le pays d’origine ? Où est alors la fidélité, et la fidélité à quoi ? De l’autre côté, l’on sait que la fidélité totale à ce qu’il y avait avant, dans le pays d’origine, engendre un isolement aussi total par rapport au pays.

Lors des dernières journées des communautés francophones dans le monde qui se sont tenues à Paris, quelqu’un a rapporté ce fait tout compte fait anecdotique mais ô combien symptomatique de ce rapport à l’isolement. Cela se passe quelque part dans le monde, et les locaux se plaignent du prêtre de la communauté francophone, en lui reprochant de ne prendre absolument pas la peine même d’essayer de s’intégrer tant soit peu dans le pays qui l’accueille, en disant : « au bout de trois ans, qu’il apprenne au moins à dire Bonjour dans notre langue »

Intégration totale ou isolement aussi total, sources de conflits interne assurés. Les persécutions viennent alors non de l’extérieur, la culture ambiante de l’époque en Egypte étant très libérale en matière religieuse, mais bel et bien de l’intérieur. Le passage que nous venons d’entendre exprime les réactions, à l’intérieur de la communauté, des uns par rapport aux autres.

« Il nous reproche de désobéir à la loi de Dieu et nous accuse d’infidélité à notre éducation »

C’est un fait que personne n’aime les donneurs de leçons, surtout quand on sait que l’on est en tort. Pour le voleur, l’homme honnête est un reproche vivant ; pour le violent, l’homme pacifique et doux est intolérable. Deux solutions : changer de conduite ou faire taire celui qui nous fait de l’ombre. L’auteur du livre de la Sagesse (anonyme) penche du côté de la défense de ceux qui tentent à rester dans la fidélité. Il n’entre pas dans les nuances que nous aurions introduites pour décrire l’attitude possible d’une coexistence pacifique interculturelle sans risque pour la foi. Cela devrait sûrement exister comme possibilité d’être fidèle à l’esprit tout au moins, comme les premiers chrétiens l’ont fait à l’égard du judaïsme religieux dans ses aspects sociaux, en en gardant seulement quelques prescriptions jugées indispensables pour la foi au Christ. Il s’agit donc de la fidélité, comme celle que Jésus exprime dans sa vie et qui ne le  fait  pas pour autant échapper au pire.

Sans aller jusque-là, dans nos communautés chrétiennes d’hier comme de demain, qui ont toutes pratiquement les mêmes caractéristiques, il y a aussi ce que St Jacques dénonce dans la deuxième lecture : « La jalousie et les rivalités mènent au désordre et à toute sortes d’actions malfaisantes. » St Jacques, conformément à l’usage bien répandu dans la littérature biblique et païenne de l’époque, montre deux voies possibles. L’une est celle de la jalousie, de la révolte, du conflit et de la guerre, l’autre celle de la paix, de la bienveillance, de la justice et de la miséricorde. D’un côté la sagesse terrestre avec ses lois de la jungle, et de l’autre la sagesse céleste. Ces difficultés comme leurs valeurs opposées peuvent être d’ordre matériel ou spirituel.

Le fanatisme des idées par exemple, est dans cette distinction entre deux voies terrestre et céleste, nettement mis du côté de (proposition : privilégiant nettement la sagesse terrestre au sens négatif du terme. Le fanatisme est donc logiquement l’expression d’un paganisme. Situer le fanatisme ainsi, porte un éclairage supplémentaire sur le débat sur l’inculturation et la fidélité.

Dans l’évangile, Jésus aussi prend position sur ce débat entre la culture et la foi. Pour bien voir quel Dieu il est en train de révéler au travers de sa vie et de ses paroles et actes, il prend l’exemple d’un enfant pour dire où se trouve la fidélité à Dieu : dans l’attention au plus faible (enfant, mais pas enfant-roi, notion qui n’existe pas à l’époque). Sa question posée à ses disciples, « de quoi discutiez-vous en chemin » est aussi une question qui nous est posée, à savoir qu’est-ce qui nous préoccupe le plus dans notre vie et comment la sagesse céleste trouve-t-elle sa place dans nos préoccupations, prosaïquement terrestres, par ailleurs si inhérentes à notre existence, Dieu le sait, il ne nous demande pas de sortir de la terre mais d’y être des témoins fidèles remplis de sa sagesse.

Si en Jésus nous accueillons les plus faibles, en tout cas plus faibles que nous juste au moment où ils le sont par rapport à nous, car cela peut aussi vite changer, si nous l’accueillons, en lui nous accueillons Dieu lui-même. Et la présence de Dieu procure, avec une joie inexprimable, une paix profonde. Un tel accueil n’est que justice, comme Jacques le rappelle quand il dit que « c’est dans la paix qu’est semée la justice ». Quelle réponse pouvons-nous donner, sinon en reprenant les paroles de confiance formulées dans le Psaume « Le Seigneur est mon appui entre tous ».

La culture et la foi, les exigences de l’une et de l’autre ne sont pas forcément contradictoires, c’est plus la question du filtre à utiliser pour savoir comme faire façonner (adapter ? harmoniser ? l’une et l’autre) l’une par rapport à l’autre, sans jamais toutefois oublier l’objectif final, louer Dieu en toute chose

AMEN