2016/01/23 - Homélie - Mariage de Shubin et Eric

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Chers Shubin et Eric,


Par le choix de l’évangile que nous venons d’entendre, les noces de Cana s’invitent à vos noces et ceci avec tout le cortège de symboles au combien puissant pour toute vie chrétienne et celle d’un couple, comme le vôtre aujourd’hui. Marie a déclenché en Jésus son fils l’entrée dans sa mission, celle de témoigner de l’amour de Dieu et du désir de sauver toute la création par un tel amour qui s’exprime dans la confiance et fidélité totales. Qu’est ce qui a déclenché en vous ce désir de vous engager dans et par le sacrement du mariage ? Qu’est-ce qui déclenche en nous tous d’ailleurs, qu’est-ce qui libère en nous ce qui est notre destinée, notre mission, ce à quoi nous nous sentons d’une manière ou d’une autre appelés et qui nous procure sentiment de plénitude et d’accomplissement de vie marquée par l’harmonie entre toutes les dimensions de notre être. Le bonheur, en termes purement humains, s’apparente  un peu à cela. Mais ni les noces de Cana ni votre décision de recevoir et vous donner le sacrement de mariage, ne se limitent iquement à la recherche d’un tel bonheur. Tout en s’y appuyant, il le dépasse dans le désir d’être uni à Dieu qui comble au-delà de tout désir, et le croyant par moment peut identifier une telle sensation dans son existence. Nous croyons que c’est Dieu qui par l’intermédiaire d’un autre déclenche quelque chose de positif en nous, Marie pour Jésus, les Epoux l’un pour l’autre, les parents pour les enfants, enseignant pour ses élèves etc. Et dans une telle dynamique un processus de transformation s’opère, processus que l’on peut décrire à l’aide de trois mots : Eau, vin et sang. Ce sont les trois éléments concrets qui, symboliquement et successivement signifient le passage et la transformation de cette vie terrestre  toute donnée, jusqu’au bout de la charité et ainsi transformée en la vie spirituelle marquée par l’expression de la charité divine.  Le vin qui est au milieu est le vin de la fête, et il ne faut pas l’oublier dans la vie terrestre, tout comme il est le symbole de la vie en Dieu.  Et la fête on ne la  fait pas tout seul.


Chers Shubin et Eric,


Vous n’avez pas attendu aujourd’hui pour comprendre qu’il n’est pas bon pour l‘homme (ni pour la femme) d’être seul. La solitude dont parle le livre de la Genèse, n’est pas tant celle que l’on pourrait s’imaginer en premier, à savoir une solitude provoquée par le mangue de relation affective espérée  dans une vie partagée entre deux êtres : homme et femme selon le désir de Dieu dont parle la Bible. Ni même celle que l’on pourrait qualifier d’existentielle, solitude qui fait plonger dans les abîmes du mystère de la vie humaine sur terre avec toutes les questions que cela génère en terme du pourquoi et pour quoi  faire suis-je ici, sur cette terre, sans pour autant y trouver quelques points d’appui pour une existence équilibrée et pérenne. La solitude dont parle la Bible est celle de toute une vie, à prendre en compte dans toutes ses dimensions, jusqu’à la dimension spirituelle, mais laquelle donne sens aux autres dimensions, à savoir la dimension purement humaine et voire même celle de la nature charnelle. C’est à partir de la dimension la plus importante qu’il y à regarder toutes les autres. Car l’os de mes os et chair de ma chair, veut dire l’égalité de dignité à cause de la provenance de la même source, Dieu les créa.


Chers Shubin et Eric,


Vous n’avez pas non plus attendu aujourd’hui pour accéder à la richesse de la vie des mariés au sens unis pour faire un seul corps et un seul esprit. De cette union trois magnifiques filles sont nées, dont une a le privilège d’être témoin de votre mariage en représentant de la sorte les deux sœurs vivant au loin géographiquement mais sûrement si proche car présentes par la pensée et affection à votre égard. Votre mariage c’est aussi le mariage des parents de vos enfants. 


Alors qu’est-ce que célèbre-t-on aujourd’hui ? On célèbre votre union devant Dieu et en Église. Une seule chair et une seule âme vous l’êtes depuis tant. Le  sacrement de mariage aura des effets rétroactifs sur vous et sur vos enfants. Comment cela ? Pour avancer constatons d’abord que pour Dieu le temps ne compte pas vraiment, et si oui c’est seulement à cause de nous qui y  sommes plongés et ceci  en vertu de notre vie sur cette terre. Puisque donc le temps ne compte pas vraiment pour Dieu, c’est en un certain sens aussi un peu pareil pour les sacrements qui signifient l’accueil de la grâce de Dieu, de sa présence divine. Je veux dire par là que le sacrement de mariage dans votre cas, agissant évidement pour votre vie quotidienne dès aujourd’hui (comment, ceci reste à identifier) agit aussi rétroactivement, parce que ce que le sacrement du mariage expriment pour vous en terme d’union en Dieu, en Christ, il l’exprime aussi pour les fruits de votre union que sont vos enfants. Le sacrement de mariage  agit donc sur vos filles aussi comme une conséquence naturelle logique découlant d’une telle vision de ce qu’est le mariage célébré dans l’Église catholique.
Et cependant, tout en vous unissant devant Dieu de la sorte, avec toutes les conséquences pour vous et pour vos enfants, le sacrement de mariage ne concerne que l’engagement ici sur terre. Car au ciel, cette fonction d’être cocréateur avec Dieu dans l’acte de la procréation et de ses conséquences en termes de transmission de vie physique et transmission des connaissances pour connaître et reconnaître Dieu, n’aura plus de cours. A cause de cela, votre engagement de mariage ne passera pas le seuil du ciel dans la vie éternelle. Dommage diriez-vous peut-être!


Et pourtant la vie d’un couple chrétien, comme vous entre deux catholiques, est un chemin de sanctification mutuelle et le sacrement de mariage donne à un tel chemin une marque divine d’engagement de Dieu à votre égard pour vous soutenir sur le chemin de la foi en les réalités célestes, éternelles. Donc tout ce que vous avez déjà expérimenté  dans les cadres de vie commune et de famille en terme de charité, à savoir cet amour qui fait dépasser les montagnes quand un enfant et malade, quand il faut se lever la nuit  et y veiller, en vous souciant de ce qu’il va devenir et comment lui donner le meilleur de ce que vous croyez pouvoir donner, et pourtant donc une telle véritable charité inspirée par Dieu était déjà présente dans votre vie et c’est seulement elle qui franchira le seuil de la vie éternelle, car, comme nous le rappelle Saint Paul dans la seconde lecture, ni foi ni espérance ne seront plus nécessaires. 


Cher Eric et Shubin


En disant cela, ne pensez pas que je suis en train de dire que  vous n’avez plus rien à faire ni espérer de votre vie de couple, désormais marquée par la puissance de la grâce sacramentelle en vous. Votre jeunesse spirituelle ne fait que commencer. Vous êtes aux commencements d’une création nouvelle, celle de votre couple, désormais dévoués à cette réalité visible qui se rend présente dans vos corps dans vos cœurs dans vos âmes, cette réalité que vous avez cherchée à appréhender sans pouvoir lui donner un nom celui d’un OUI, d’un engagement devant Dieu et les hommes, OUI que vous allez dire dans quelques instants  pour compléter ce oui déjà dit devant vous l’un pour l’autre et à l’égard de vos enfants.               AMEN