2013/11/24 - Homélie - Christ-Roi

Imprimer

I.
Beaucoup d’entre nous, ne sont pas très à l’aise avec cette fête et ceci pour plusieurs raisons. Tout d’abord, en raison de l’histoire de la France au cours de laquelle un roi fut décapité, portant ainsi  un coup quasiment final à la monarchie de droit divin. Puis, en lien avec le précédent, mais de façon plus prégnante et diffuse, nous avons du mal à admettre une autorité au-dessus de nous-même.


A ces raisons bien historiques s’en ajoute une qui est encore plus importante, car touchant au sens de la foi chrétienne : comment reconnaître un roi qui n’a rien de puissant ni de glorieux ?


De fait,  la croix pour trône, ce n’est ni signe de  puissance ni de gloire. Mais  en disant cela, on n’a pas tout dit sur ce Roi-là. Le Christ-roi est porteur de la promesse divine donnée à la descendance du roi David. Le messie, fils de Dieu,  et donc sans péché,  le Christ, de lignée davidique,  assume cependant totalement la condition humaine.
Il le fait, y compris dans ce que le roi David avait comme faiblesse, et en lui, tout le peuple de la promesse et au-delà, jusque l’humanité tout entière. 
Puisque la puissance et la gloire sont les deux premières caractéristiques d’un roi, en quoi donc ce roi qui trône sur une croix  a tout de même quelque chose de puissant et de glorieux?


II.
Dans l’évangile  d’aujourd’hui nous entendons les paroles échangées  entre Jésus et les  deux larrons qui sont crucifiés avec lui.


Le premier lui dit ‘sauve-toi toi-même et nous avec’. Il répète ce que les autres ont dit par deux fois, juste avant.
Il partage l’amertume d’une vie ratée, car écourtée, surtout la sienne, car au fond qu’a-il à faire de la vie des autres ? Mais, une telle amertume, comment ne pas la trouver légitime en de pareilles circonstances ?
Cependant, Jésus ne répond pas.


Le second larron demande à Jésus de faire fonctionner sa mémoire à son sujet : ‘souviens-toi’ Et là, Jésus donne une réponse : ‘avec moi, tu seras dans le paradis’. Pourquoi Jésus n’insiste pas pour sauver le premier, alors qu’il signifie le salut de l’autre ? 
Laissons  sans réponse une telle question ou plutôt plongeons-là dans l’immense  océan d’amour mystérieux de Dieu. Dieu désire le bonheur de chacun, mais sans pouvoir forcer qui que ce soit.
Notre liberté est là pour répondre d’une manière ou d’une autre, cependant personne n’est neutre dans l’affaire. Dieu désire  voir l’univers des hommes dans son univers à Lui. Jusqu’où va son désir et jusqu’où va le nôtre?


III.
La deuxième lecture nous dit le désir du Christ qui est celui de Dieu : ‘Il a voulu tout réconcilier par lui et  pour lui, sur la terre et dans les cieux,  en faisant la paix par le sang de sa croix’ (Col 1,20). 
A-t-il réussi ? Déjà sur la croix, l’un a recueilli les effets de sa volonté, mais pas les autres, et tant d’autres !  En quoi est-il  donc ce roi efficace, parce que puissant et glorieux ?


IV.
C’est le refrain du psaume qui nous donne la clef pour comprendre en quoi, le Christ est le roi véritable : ‘Ton règne Seigneur est un règne de paix.’  Où y a-t-il une paix véritable ?
Certainement là où il n’y a pas de distinction entre les premiers et les derniers, entres les forts et les faibles, entres les chanceux et malchanceux, mais là où tous sont frères et soeurs. 


Certaines utopies modernes sont allées dans cette direction,  et en trouvant que le faire sans Dieu c’était plus simple car plus efficace qu’avec.  On en a vu les conséquences et on en voit encore.


Face à l’échec produit par les religions ou les idéologies sans, la troisième voie semble se dessiner depuis, grosso modo, la deuxième guerre mondiale. C’est la voie dans laquelle s’engagent ceux qui pensent  que s’occuper uniquement de soi-même, quitte à râler contre les autres, serait la meilleure  solution pour survivre. Ni sauve-toi toi-même et nous avec, ni souviens-toi de moi, mais chacun pour soi, semble dominer dans le brouhaha de la  société dite moderne.


V.
Quant à nous, les chrétiens, nous croyons en ce Christ roi de l’univers,  lui qui nous offre une royauté qui n’est pas de ce monde.  C’est la puissance du service qui est la gloire de  Dieu.


C’est la gloire de Dieu qui se manifeste dans la paix véritable.


Jésus durant toute sa vie  annonçait ce royaume et luttait contre les confusions sur son identité.


A notre tour, nous avons à être ses heureux disciples au service d’une telle royauté.


‘Seigneur, fais que toute la création, libérée de la servitude, reconnaisse ta puissance et te glorifie sans fin. Amen’