2019/11/27 - Journal - Kuala Lumpur

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Thalassocratie


On connaît tous la thalassothérapie, mais thalassocratie n'est pas loin. L'art de gouverner sur les mers n'est pas fait uniquement de guerres incessantes pour le contrôle de l'espace aquatique dans une posture de liquide society d'hier et surtout d'aujourd'hui (Zygmunt Bauman). C'est aussi une manière de se faire entendre entre différents groupes d'influence pour faire durer une présence. C'est qui s'est produit dans le détroit de Malaka, le passage obligé pour aller chercher les épices à Célèbes, tant désirées ailleurs pour relever le niveau du plaisir qui colle tant au palais et ses papilles gustatives.


Bouddhisme et hindouisme amalgamés dans une nouvelle religion coexistent pacifiquement  ensemble, ceci expliquant cela. Régime politique de gouvernance tournant entre sept royaumes qui font partie de la fédération à quelque chose d'un conte de fée où la bonne fée compte sur l'efficacité durable de sa baguette magique.


Comme malais, chinois et indiens, baba et nyonya (homme femme) peuvent prospérer dans une vie familiale. 97% des enfants sont scolarisés, la langue malaise et l'islam constituent le double fond de l'unité, même si l'anglais est communément répandu, surtout dans les grandes villes, même si la tolérance religieuse est inscrite dans le code de comportement social. À ceci près que, depuis une vingtaine d'années, l'islam radical s'installe, ce qui inquiète ceux du dedans du pays comme  ceux de l'extérieur.


God, Glory, Gold, trois G des Portugais, puis anglais et hollandais s'est transformée en appétence pour la modernité. Gold réussira-t-il à manger les deux autres, après tout, c’est déjà fait ailleurs.


L'étain et  le caoutchouc, les chinois d'un côté, les indiens de l'autre. L'industrie minière et l'exploitation forestière, le double socle de prospérité sans oublier les fruits du paradis, fruits parfois défendus. À Ipoh (près de 200 km au nord de la capitale) une vitrine dans un immeuble pour capter consommateurs en mal de souvenirs;  l'écriteau est sans équivoque; Only at Han Chin Pet Soo Gambling, Opium, Girls.


Heureusement qu'il y a Kakilima, ce passage couvert pour protéger de la pluie et du soleil, et des mauvais souvenirs aussi.


Ipoh par le  train en traversant la jungle,


dont les lacs témoignent de l'extraction de l'étain et les palmiers plantés par un français de la richesse actuelle tirée de l'huile. La faune sauvage s'y cache; ne sors pas la nuit, me prévient Henri - photographe et reporter de guerre au Cambodge sur les Khmers - les tigres chassant du sanglier,  s'approchent aussi des villages, on connaît la suite.


Et déjà le retour aussi dans le train, mais seul cette fois, alors qu'à l'aller j'étais avec Henri qui m'y a entraîné à l'occasion de son déplacement pour terminer son livre sur la ville de Ipoh. Encore à la gare de Kuala Lumpur, il me présenta la responsable de la communication des chemins de fer avec qui il avait réalisé un film sur la Malaisie, et ce à partir du train qui traverse le pays. En compagnie de son assistante Farsha, nous sommes  accueillis à la paroisse de Saint Michel dont nous visitons l'église et le cimetière attenant. La tombe du MEP p. Coppin, un grand architecte devant l’Éternel d'églises et des autels, grand serviteur devant l'Éternel aussi. La deuxième visite marquante est celle de  l'école de Lasalle. Durant la seconde guerre le bâtiment était occupé par l'armée japonaise qui y a élu son quartier général. L'armée arrivée à vélo et à la barbe des anglais qui n'ont vu que du feu.  Nous visitons le lieu où était détenue et torturée la fameuse résistante d'origine française. Entre les deux visites le  déjeuner dans un restaurant chinois, les chrétiens sont issus soit de chinois soit d’indiens. Les chinois sont les descendants des Haka de Hong Kong  et de toute la région de Guangdong. Leurs ancêtres sont venus pour travailler dans les mines d'étain;  la moyenne de survie 5 ans, comme pour les missionnaires autrefois. Lors de la visite de l'école quelqu'un dit y avoir été seulement quelques mois, car financièrement c'était trop difficile, sans aucune aide de la part du gouvernement, dont bénéficient par ailleurs les malais natifs seuls. À ma remarque sur la discrimination, presque tous en cœur se sont exclamé : discrimination, oh oui! Ils sont presque tous catholiques, l'islam est la religion officielle. Et l'islam dur s'installe comme en Indonésie. 


La thalassocratie prend l'allure d'une modernité au visage voilé.


Après la rencontre avec le conseil pastoral le soir de mon arrivée (j'aimerais avoir la présentation sur PowerPoint, merci Claire!) et la conférence : comment être chrétien (missionnaire) en situation minoritaire; après les messes célébrées à la maison, sans raison particulière ou pour une raison bien d'à propos;  après les confessions, rencontres, trouvailles et retrouvailles, individuelles, en famille, en communauté toujours,  échanges, débats, prières toujours;  et même après avoir plongé dans la piscine en signe d'immersion culturelle et spirituelle, corps et âme (comment dévisser l'âme du corps qui flotte, elle flotte avec, yoga flotte aussi comme une solution à mal-être du corps qui cherche le bien-être seulement, car l'âme qui cherche le bonheur n'a plus voix au chapitre, ou alors on prend sa voix pour celle d'un pitre) pour une détente musculaire, mentale et d'autres bien mineures; après avoir discuté avec les chauffeurs de taxis si prompts à une telle praxis...


Je suis dans l'avion pour Hong Kong avec tout cela. 


Merci à tous et à chacun et plus spécifiquement à Melchior et à ces sœurs qui avec les rois mages peignent la ville en rouge, ce qui est à traduire de l'anglais en français en couleurs de l'arc en ciel. Qui va s'en plaindre, sûrement pas moi, et j'ose espérer pas vous, pas plus que l'Éternel, car ainsi va la vie qui parfois nous sourit.