Tout va bien dans la vie,
Tout semble se dérouler,
Comme dans un rêve.
Comme dans un paradis,
Rien ne pourra troubler
La reconnaissance de la grandeur de Dieu
Pas plus que le désir de le suivre.
Tout baigne dans la lumière,
Bien que.....ton coeur saigne, Seigneur !
Eh, oui ! ce paradis ce n’est pas pour tout de suite !
La souffrance s’invite,
La mort guette au coin des lèvres qui respirent, encore !
La vie limitée prend du relief,
Elle qui semblait baigner dans une étendue sans fin !
Le bonheur est troublé.
Il est troublé, le bonheur, par les souffrances
Et la mort prochaine d’un ami, d’un si proche,
Tellement proche que là en revanche, rien ne pourra
Troubler une telle intimité !
Le bonheur est troublé, mais pas l’intimité.
Elle, elle est si limpide, si cristalline.
Le bonheur est troublé, lorsque quelque chose de profondément désagréable
De franchement inquiétant pour les entrailles s’invite
Et ne vous quitte plus.
C’est Dieu qui souffre et moi avec.
Lui pour tous, moi pour moi,
Comme l’un ou plutôt l’autre larron,
Mais avec lui !
Ainsi soit-il !
Erkenne mich, meine Hüter, Reconnais-moi mon berger ;
De toi découle beauté, douceur et joie céleste.
Quel soulagement de le savoir,
Rien qu’à y penser, de nouveau tout baigne dans la lumière.
C’est le jour de grâce,
C’est le moment favorable,
Où rien n’est lourd,
Rien n’est compliqué,
Tout est simple,
Certes tout est grave,
Mais tout est joyeux.....
Tout,
Puisque, dans l’offrande de la vie,
La véritable communion est là,
Là, dans l’offrande de la vie !
Dépêchez-vous, les âmes tourmentées
Dépêchez-vous !
Où ?
Au Golgotha !
Volez, les âmes, volez avec les ailes de la foi !
Où cela ? où cela ?
A la colline, colline de la foi !
Votre salut y fleurit
Un rendez-vous au Golgotha, ce lieu de (du ?) crâne !
La mort y a déjà préparé un tapis clouté
Pour accueillir les passants de la vie,
Eux, qui deviennent des arrivés.
Elle, elle leur a mis la table
Pour un festin bien funèbre
Sa joie est au comble de ses ténèbres !
Attirer des naïfs dans des lieux
On ne peut plus obscurs...
Quel bonheur, et quelle monture
Pour un pégase qui s’envole
Qui s’envole et qui s’écrase.
Annonce de la quête, musique
Erbame dich, Herr, erbame dich !
Aie pitié de moi Seigneur, aie pitié !
Bach, lui, inégalé dans toute sa musique et dans tous ses cantiques, ici Bach, se dépasse lui-même, est-ce possible ?
Lui, pauvre pécheur, lui l’humble marcheur sur les traces du Christ. Lui, le planeur qui surfe sur les notes de musique se posant devant lui, comme le tapis d’Aladin, pour l’accueillir là où se trouve déjà, elle, sa musique, mais pas encore lui dans sa propre vie.
Il y en a qui comme dans une communication téléphonique par satellite, sont tellement en décalage, que lorsque les anges font le récit de leur vie, il faut du temps pour que leurs oreilles terrestres puissent capter ce qui est en train de leur être confié.
Nous voici devant le morceau de musique, le plus prenant, comme d’autres le sont devant un morceau de parchemin ou papyrus tout fraîchement découvert, immaculé pour les yeux et l’âme, et qui tel le contemplent.
Rien d’étonnant à cela, c’est le morceau sur lequel s’écrit la repentance, la conversion, le point de bascule pour toute vie chrétienne, bascule arrivant quelque part sur la trajectoire d’une vie.
Aie pitié de moi, Seigneur ; aie pitié de moi ; de moi et de mes larmes !
Aie pitié de moi, à cause de mes larmes !
Regardes vers moi, mon coeur et mes yeux pleurent amèrement devant toi !
Il est temps de naître
Il est temps de disparaître
Enter les deux, le temps de pleurer
Pleurer sur le fait de naître
Et sur le fait de ne pas pouvoir disparaître
En attendant mieux paraître
Dans cet espace où les gouttelettes
De conscience perlent sur le front cadavérique,
Comme sur un front peint au couleur de la mort, d’une macabre fresque, (c’est à cause de la fresque que j’ai envie de mettre le cadavresque).
A quoi pense-t-il, un crâne portant un tel front,
peint aux couleurs de la mort, lui, le crâne,
qui n’est pas encore sur le Lieu du Crâne ?
En attendant, à la tienne !
Buvons à la santé des morts, trinquons !
Tout est engagé dans son amour
Même le vouloir de la mort
Qui pourrait le faire comme lui ?
Qui comme lui le pourrait ?
Lui seul, car c’est seulement
dans l’amour absolu que
Le vouloir et le devoir ne font qu’un !
Tout est accompli ! Er ist vollbracht
la mort sautille autour, se pose sur les épaules, entre dans les oreilles,
elle devient intime, elle est toute joyeuse...
Tout l’inverse de celui qui va mourir, bientôt, très bientôt, dans quelques instants.
Mais, là, dans ce rendez-vous étrange, ils sont trois : lui, la mort, sans oublier son Père, cela va de soi !
Tout est accompli !
Je vais te raconter ma plainte.
C’est toi qui es maintenant cloué sur la croix !
Moi, en racontant ma plainte, je ne me plains pas !
Je voudrais juste savoir si ce ‘tout est accompli’ est aussi pour moi ?
Crois-tu ? car moi, je ne le crois pas !
Je ne crois pas, tant que je ne suis pas sûr d’hériter de ton Royaume !
Je ne le crois pas, tant que la rédemption du monde n’est pas totalement assurée !
Tu crois ou tu ne crois pas, c’est comme ça !
O Haupt voll blut und wunden
Visage couvert de sang et de blessures !
Une nouvelle identité, une nouvelle photo
Dans le passeport pour l’éternité dans le pays de morts.
D’où il n’y a même pas de revenants !
Qu’est-ce qui en reste ?
Un masque mortuaire ?
Non ! pas le masque, mais le vrai visage
Le mal ne se cache pas dans la peau,
Ce Jésus terrassé, le mal, il l’a maintenant dans la peau, dans sa peau, comme dans sa poche.
Mais le malin voudrait
Que la peau soit un masque mortuaire.
Juste ça !
Non, elle n’est pas le masque, elle est le vrai visage.
Là-dedans, dans cette souffrance
Fixée pour le temps d’éternité sur terre
Les deux derniers morceaux, les deux dernières partitions, les deux dernières productions,
Juste avant de reprendre la route de retour, avant de rentrer chez soi ;
Reprendre la route et rentrer chez soi, est-ce la même chose ?
Pourquoi être gêné par les deux variantes d’un synonyme ?
En fait, reprendre et rentrer ne se trouvent-ils pas en bonne compagnie avec le repartir ?
Oui repartir plus vivant, plus avec nous-même. Certes, meurtris, mais plus avec nous-même !
Quelque soit la paix, elle sera le lot de tous les porteurs de rameaux
Reposez en paix, dépouilles sacrées et apportez-moi aussi la paix
Refermez l’enfer et ouvre-nous le ciel pour toujours.
µµµ
SDG***Soli Dei Gloria
Tel que signait souvent Bach
Collégiale Saint Martin de Montmorency : 1er avril 2012
Choeur EAUBONCANTO, dirigé par Benoît Mariaux
Soprano : Cécile Pierrot
Alto : Florence Carpentier
Basse : Bastien Milanese
Piano : Ana Maria Gorce
Récitant : Rémy Kurowski
Orgue de choeur : Elisabeth Guy-Kummer
Grand-orgue : Bastin Milanese (entrée) et Maris Podekrat (intermède)