2012/05/29 - Méditation personnelle - ANGE ET DÉMON

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- Ça me démange, dit l’ange.
- Faire le démon, c’est mon affaire, réplique celui-ci.
- Ça me démange mais je suis un ange.
- Alors que moi je peux faire les deux.
- Comment cela ?
- Oui c’est dans ma nature, d’être tantôt l’un tantôt l’autre !
- Mais, tout en passant pour ange, tu demeures démon.
- Non, c’est tout en faisant le travail de démon que je demeure ange.


Silence glacial s’installe et prend même l’ange qui tout de même, malgré son sens aigu d’éternité bienheureuse, dans une sérieuse réplique se dérange :


- Souvenirs, souvenirs, tu te prends pour un ange raté !
- Oui, en quelque sorte, car je suis un raté qui ne peut pas disparaître.
- Tu veux dire t’envoler, te volatiliser pour conquérir d’autres cieux  ou d’autres enfers ?
- Non, je ne peux même pas me supprimer, je suis condamné à perdurer éternellement  dans cette  maudite, dans cette modique existence.


Ange jubile :
- Un ancien ange en qualité de démon actuel a intenté à sa vie, tu me fais rire !


- Certes, sans succès, j’aurais préféré que l’on écrive qu’un démon ès qualité d’un ancien ange s’est vaillamment battu avec l’éternité qui lui collait tant à la peau. Qu’il s’est battu, sans jamais pouvoir disparaître de la scène, car ce qui lui est si étrange, voici qui éternellement le démange. Et pourtant, qu’est-ce qu’il aurait été beau de lire ‘Et maintenant un actuel démon, se rappelant aux bons souvenirs de la vie éternelle d’un ange, pour la dernière fois, vient de descendre les marches de l’enfer. Il vient de le faire pour se mesurer avec son propre néant.’ Oui, son propre néant, car c’est préférable  à une existence empruntée à quelqu’un, fût-il l’Eternel lui-même. Le propre néant nous est si proche et si familier, alors que ces rafistolages d’éternelle attelle sur le grand corps malade ne tiennent pas pour deux onces de belle et froide rationalité.            


Ange se permet :
- Pour une fois  tu parles ouvertement !


L’autre semble se défendre :
- Cela m’a échappé, est-ce l’effet de la démence sénile ?


Ange, plus que jamais farouche, en rajoute une couche :
- Moi qui suis d’éternelle jeunesse et toi d’éternelle tristesse, là tu dis vrai, ce qui n’est pas très réjouissant non plus !
- Pourquoi n’est-ce pas la vérité qui sauvera, tu aurais été touché en plein vol de ton extase mystique, tu aurais pris du plomb dans l’aile de ta fluidité sempiternelle ? Serais-tu nostalgique de mon échec, de ma réussite si tu le préfères ? Me prends-tu en pitié ? Tu crois que je ressasse  éternellement ce qui éternellement n’est pas tenable, si tu ne me crois pas, que tu ailles au diable  pour l’amour du ciel.


- Arrête de jouer à l’agent double, là tu ne m’auras pas, même si tu me troubles.


Démon ne se démonte pas :
- Tu as raison, tout cela n’est pas très réjouissant, mais c’est tout de même consolant, car la tristesse démentielle vaut mieux pour moi  que la joie de tout ton ciel.


Et pour conclure, l’ange de dire :
- Ce fut un étrange échange entre un démon…


Démon complète :
- Et un ange !


Rideau.