2010/04/11 - Conférence-débat - "Haïti, quel espoir ? quel avenir ?"

attention open in a new window ImprimerE-mail

Trois mois après le tremblement de terre en Haïti, le Père Rémy proposait une rencontre avec la participation d’un couple et d’un paroissien, originaires de Haïti, afin de dresser une évaluation de ce qui avait été fait, et de ce que nous pouvions faire à long terme.

 

Spontanément, à l’annonce du séisme, des quêtes dans le diocèse ont été effectuées, mais nous réalisons bien que seule l’émotion ne doit pas guider notre action, et que nous devons nous inscrire dans une dynamique à longue durée. Cette réunion avait également pour but de préparer l’Assemblée Pastorale du 29 Mai où seront prises les décisions concernant nos actions futures.

 

Les interlocuteurs nous ont présenté un film nous permettant de comprendre l’importance des dégâts : actuellement, on compte un million de sans abris, 87 % des infrastructures ont été endommagées : Cathédrale, palais national, commissariat, hôpitaux, écoles, universités… 15.000 enfants sont dans les rues. De source sure, les dégâts ont été évalués à 8 milliards de dollars.
De par sa situation géographique, ce pays est régulièrement touché par les cyclones et a déjà connu par le passé de nombreux tremblements de terre de moindre ampleur que celui de Janvier 2010.

 

9 millions d’habitants vivent en Haïti et comptent pour vivre sur la solidarité internationale et sur les transferts de la Diaspora. Tous les haïtiens ont au moins 2 ou 3 personnes de leur famille vivant et travaillant à l’étranger, principalement aux Etats-Unis, et au Canada.
80% de la population locale vit avec moins de 1$ par jour, le taux de chômage atteint 70%...
Si Haïti essaie d’instaurer une démocratie, c’est encore le règne de la corruption et de l’instabilité politique qui dominent : cela bloque bien évidemment le développement.

 

Devant cette situation, ce qui fait ‘’tenir’’ les haïtiens, c’est avant tout la foi chrétienne très forte.
Cette foi a permis une mobilisation et une solidarité importante entre les habitants.
Le gouvernement pour sa part est actuellement dans la phase d’évaluation, d’enquête, et d’estimation des dégâts, mais tout est rendu difficile : beaucoup de responsables ont péri, et les infrastructures détruites.
Pourtant le gouvernement souhaite appliquer un plan de développement des infrastructures, de l’agriculture, une relance du tourisme. 9 milliards de dollars leur ont été promis par la mobilisation internationale, dont 5 milliards dans les 2 ans à venir. La priorité sera donnée au logement, à la santé, et à l’agriculture.

 

Aujourd’hui, on ne peut pas dire qu’une quelconque reconstruction ait commencé. On note l’hostilité des haïtiens à l’aide étrangère.

 

Le débat s’engage : Que faire ?

 

Prier.
Compter sur l’aide de la Diaspora.
Essayer d’organiser des créneaux surs pour l’acheminement des aides.

 

La Conférence St Vincent de Paul vient de faire partir un container pour apporter des aides pour les enfants( lits, vêtements) ; ce container sera accompagné par un membre de l’association afin d’être sur qu’il arrivera sur site et ne sera pas saisi avant.
Il n’y a pas de circuits surs, la douane est corrompue et la majorité de l’aide envoyée ne parvient pas à destination.
Il faut à tout prix éviter les intermédiaires : en ce sens, certaines structures de l’Eglise peuvent être intéressantes (Caritas, St Vincent de Paul implanté aux Antilles).

 

A ces difficultés d’acheminement de l’aide s’ajoute la fierté des Haitiens qui ne veulent pas qu’on leur impose une reconstruction : de ce fait, personne ne prend le risque d’investir en Haïti.
En Haïti, il y a toutes les compétences nécessaires : manquent le matériel, les machines, l’électricité qui n’est pas encore rétablie.
Pour éviter la douane, on ne peut que compter que sur le réseau des associations.
De plus, actuellement, personne n’ose reconstruire, en raison de petites secousses qui poussent le gouvernement à demander d’attendre encore. De plus, avant d’envisager la reconstruction, ne faudrait il pas prévoir le reboisement de certaines régions, pour éviter le ravinement des pluies ?

 

A Port au Prince, la population est beaucoup trop nombreuse : pour cela, on essaie de dynamiser les villes voisines afin que les gens s’y installent  et quittent la capitale. Dans l’esprit de beaucoup, tout ce qui est bien est à Port au Prince, et ce sont les mentalités qu’il faudra changer.

 

Dans ce pays essentiellement agricole, il n’y a ni machines, ni outils ; de plus, la terre est morcelée et chacun cultive sa parcelle pour subvenir à ses seuls besoins.

 

Le développement du tourisme doit être envisagé : les sites touristiques ne manquent pas :le jardin botanique des Cayes dans le Sud Ouest, les ruines du Palais Sans Souci au Cap Haïtien, les plages du Nord (Labadi).
La filière écologique peut également être développée grâce aux techniques de travail de la terre qui permettent la protection de la nature (pas de pollution due aux machines)
De plus, en Haïti, il existe un potentiel culturel important (peintures, musique) même si actuellement dû à l’instabilité politique, la majorité des artistes préfèrent avoir une double nationalité.

 

A-t-on quantifié les sommes d’argent entrant en Haïti, par la Diaspora ?
- ces chiffres ne sont pas connus.

 

Le gouvernement, à l’heure actuelle, pencherait pour accepter l’aide étrangère, mais les entreprises sur place la refusent, arguant qu’ils se sont battus pour obtenir l’indépendance ; toute arrivée d’étrangers est ressentie comme une invasion. Parviendra-t-on à un consensus ?
Ce tremblement de terre a peut-être affaibli l’état de corruption, par l’élan de solidarité ; peut il être l’amorce d’un changement, de quelque chose de nouveau ?

 

Un participant fait remarquer la qualité du niveau de culture des gens d’Haïti, remarquée lors des interviews. En effet, pour tout Haïtien, la scolarité est très importante.

 

Le Père Rémy apporte ses conclusions :

 

- La Foi : profondeur de la foi en Haïti.
- la fierté identitaire, insulaire.
- on rêve tous d’un pays de droits : fondation nécessaire à tout développement.
- écologie, culture, agriculture : un futur possible ?
- faire peu, mais le faire le mieux possible : chacun peut faire quelque chose.

 

Longue vie à Haïti ! dans cette richesse, il y a quelque chose qui ne peut pas mourir.