2016/07/03 - Homélie - 14e dim. ordi.
Appelés et envoyés pour apporter la PAIX, mais quelle paix ?
Voici que je dirige vers elle (Jérusalem) la Paix... comme un enfant que sa mère console, ainsi, je vous consolerai. (Is66,10-14)
Pour ceux qui marchent selon cette règle (être une création nouvelle) et pour Israël de Dieu, paix et miséricorde (Ga6,14-18)
Dans toute maison où vous entrerez, dites d’abord : Paix à cette maison. S’il y a là un ami de la paix, votre paix ira reposer sur lui, sinon elle reviendra sur vous. (Luc10,1-12.17-20)
La Paix est un don de Dieu, tout comme l’amour du prochain et jusqu’à son ennemi. On peut s’illusionner sur la paix sans Dieu un peu plus facilement que sur l’amour de l’ennemi. Il n’est cependant pas possible de voir la paix comme résultat de nos justes efforts. La paix dont parlent les lectures d’aujourd’hui est une grâce que Dieu offre. La grâce de la paix est à accueillir comme don de Dieu, gratuit, immérité, mais qui nous interpelle et nous engage.
INTERPELLE
La grâce de la paix nous interpelle par sa profondeur. Avez-vous déjà ressenti une paix profonde en vous, non pas tant comme résultat d’un bien être en prenant le café après un bon repas et en bonne compagnie. Mais cette paix qui vient comme résultat d’une libération. Libération, pas seulement comme un soulagement, ouf j’ai échappé à un danger ! même si c’est déjà beaucoup. Mais libération comme capacité nouvelle à être, comme dit Saint Paul, une création nouvelle. Cette création libérée des entraves du péché et de toute sorte d’esclavage dans lequel la condition terrestre nous emprisonne. Pour ceux qui marchent selon cette règle, dit st Paul, paix et miséricorde. Paix parce que miséricorde. Il n’y a pas d’accueil de la grâce de la paix sans passer par la miséricorde, c’est-à-dire d’être gracié par Dieu. Lui qui n’attend que cela, qui est prêt à le faire comme une mère qui console son enfant. Combien d’enfants ne connaissent pas ce chemin pour chercher cette consolation-là, ou ne le connaissent plus car l’ont perdue et oubliée ?!
La grâce de la paix interpelle donc par sa profondeur. Cette paix n’est pas juste une absence de guerre. Dans l’expérience de paix entre les peuples et à l’intérieur de chaque société jusque dans les familles, l’absence de guerre est une manière d’en préparer une nouvelle (Je t’aime jusqu’à la prochaine guerre !). Le proverbe latin Si vis pace para bellum, le dit bien. Tant de divorces entre les couples, de fractures sociales dans les différents pays et des murs de séparation entre les peuples qui sont souvent érigés en signe de haine grandissante. Alors que par sa profondeur, la grâce de la paix féconde la disposition de l’âme.
Une amie religieuse qui sent que sa vie sur terre se termine, vient de m’envoyer le mail suivant : « Mon corps est vraiment de plus en plus lent et douloureux, mais mon être profond est dans la paix et la lumière du Seigneur, et j’élargis ma prière et mon offrande unie à celle du Seigneur au monde entier »
ENGAGE
La grâce de la paix engage tout être et donc agit d’abord sur l’âme qui l’accueille avec joie. C’est une disposition de l’âme et par elle une disposition du corps au sens psychosomatique. Je peux avoir le corps un peu anxieux, mais, tant que je suis dans l’accueil confiant pour une telle grâce, l’âme demeure inébranlable. Vous vous souvenez de cette pub : « du pain, du vin et du ‘fromage », je vais bien. Tout pourrait s’effondrer, comme va le montrer l’image suivante, autour du type qui mange du fromage en buvant un coup de rouge, lui, il reste entièrement pris pas son bonheur. La pub sait détourner les choses, mais elle sait aussi capter les instants particuliers de la condition humaine. Transposons cet état que la pub met en évidence sur le bonheur impassible comme résultat de l’accueil de la grâce de la paix.
Effectivement, comment y parvenir, alors qu’objectivement les choses vont mal autour ou même au-dedans de nous-même ? De ma propre expérience j’ai appris que cela est possible en y injectant de l’espérance chrétienne. A savoir que Dieu est plus grand que tous nos troubles personnels, relationnels, sociaux, internationaux, que ce soit sur le plan affectif, économique, politique, voire militaire. C’est lorsque mon âme est en manque d’une telle espérance, qu’elle se laisse envahir par la noirceur du cœur qui, lui, sans aucun autre secours, se met alors à désespérer. La paix n’est pas en lui, car il lui manque la véritable espérance (le petit troupeau ne vous inquiétez de rien, n’ayez pas peur... etc). Dieu nous donne ce qu’il nous faut, sinon, il ne serait pas un père qui agit comme une mère et encore moins comme un Dieu tout puissant. Même si nous ne comprenons pas sa manière de procéder, il nous faut ouvrir le cœur pour l’accueillir. La paix que Dieu donne est une paix au parfum d’éternité à venir et aux couleurs d’arc en ciel, couleurs de la promesse donnée à Noé et sa descendance.
Ce don de la paix m’engage donc par le souci d’avoir à veiller sur la bonne santé de mon âme. Afin que mon âme ainsi disposée donne au cœur et à l’intelligence de quoi se nourrir à partir de ce que Dieu donne et non pas ce que la chair donne. Notre mission est d’annoncer une telle paix, non pas celle que nous nous imaginons et qui finit par s’obtenir dans les sacrifices de chair à canons. Évidemment, il ne suffit pas dire à quelqu’un, Dieu vous aime, allez en paix. Il faut encore vivre ensemble cette offrande de la vie que la Miséricorde accueille et la Paix de Dieu sera sur nous. C'est le sens véritable d’un vivre ensemble, dans la posture d’offrande. Comme maintenant venant à la messe, nous offrons à Dieu tout de nous pour qu’il fasse en nous tout venant de lui.
En début des vacances d’été, nous sommes peut-être 72 à cette messe, sentons nous envoyés en mission dans cette posture d’offrande pour porter la paix de Dieu autour de nous. Et si vous trouvez l’ami de la paix, elle va y reposer, sinon elle reviendra sur vous. Car la paix de Dieu, comme la grâce ne peut pas rester sans se poser sur un cœur humain, elle ne peut pas vagabonder tel un esprit en mal d’une incarnation. Nous sommes des messagers de la paix et notre seul salaire est la paix que nous gardons en nous quoi qu’il arrive. Même le ressentiment généré par le refus, nous le secouons comme de la poussière de nos pieds. Et réjouissons-nous, parce que comme nous le rappelle Jésus ’ainsi nos noms sont inscrits dans les cieux’. AMEN