2009/07/31 - Homélie - Saint Ignace, Lévites
La fête de saint Ignace nous plonge au coeur même de ce qu’est la foi chrétienne : une annonce à partir d’une expérience personnelle de la rencontre avec le Christ. Cette annonce est « missionnaire », le propre de la mission étant d’aller ailleurs pour établir le lien de rencontre avec Dieu sauveur. La première lecture d’aujourd’hui nous situe dans cette dynamique de façon propre à l’histoire du Peuple d’Israël. Le livre des Lévites, le troisième du Pentateuque, est situé dans la suite du livre de l’Exode. Dans celui-là sont narrés les faits de la vie « nomade » des Hébreux sortis d’Egypte en vue de leur libération et leur « errance » au désert (la nuée les accompagne). Dans celui-ci est racontée la « sédentarisation », l’établissement sur la terre promise qui se ferait au moyen de l’établissement des fêtes (Paques, pain sans levain, le grand Pardon etc.) La vie nomade tend à prendre fin au profit de la vie sédentaire. Le passage est très important, le livre étant écrit après le retour de l’exil, un autre « nomadisme » étant ainsi vécu, dont l’expérience va peser lourd dans l’envie de fixer la vie sur la terre promise au moyen de la codification des fêtes qui la rythment. Ces fêtes sont appelées les rencontres, car chaque fois il s’agit de la rencontre avec Dieu et cette rencontre est à vivre ensemble en communauté, mais elle ne peut se vivre qu’à partir de la rencontre personnelle.
St Ignace l’a très fortement expérimentée dansa propre vie et tout en étant fixé, établi, fondé dans et sur la relation au Christ, il va loin dans la réalisation de l’annonce missionnaire ; lui, par la fondation et l’établissement des règles de vie commune de la Compagnie et ses compagnons par les déplacements qu’ils vont effectuer. Ici l’établissement institutionnel précède les voyages, là bas, dans l’histoire du peuple d’Israël l’établissement institutionnel suit le temps du nomadisme. Les deux sont consubstantiels car les deux sont nécessaires pour l’annonce, pour la mission. Aux trois types de déplacements –de ceux qui sont poussés par la misère ou l’insécurité politique, de ceux qui voyagent pour affaires et ceux qui font du tourisme – s’ajoute le quatrième, celui des missionnaires pour annoncer le Christ sauveur. Le lien entre celui-ci et les trois précédents va être déterminant, non pas tant dans l’accueil de l’annonce que dans la vérité de l’annonce, car c’est la source, la vie du missionnaire qui va en être directement affectée.
Mais globalement ces déplacements missionnaires vont avoir pour but la rencontre avec Christ sauveur et ils ne pourront être accomplis que dans la perspective du rapprochement entre les différentes catégories de populations en vue de la paix véritable entre elles. La proximité entre la fête de la Pâque juive et la fête des pains sans levain (Lévites 23) est déjà le signe très fort de ce rapprochement entre les deux catégories de populations, une nomade, les pasteurs, les éleveurs qui vont de pâturage en pâturage et l’autre sédentaire, les agriculteurs. Dans l’établissement des fêtes chrétiennes cette proximité va être maintenue mais dans l’ordre inversé : la Cène du Jeudi saint, l’institution de l’Eucharistie (pain et vin, fruit de la terre et du travail des hommes) précède la Pâques du Christ (le passage qui ouvre la victoire de la vie sur la mort).
Ainsi ce n’est pas seulement Caïn et Abel qui sont réconciliés, mais de plus ils sont unis par le salut en Christ qui donne son corps pour nourriture et sa vie pour lieu de passage.