2019/08/30 - Journal - Inde, Chine : missionnaire ?
Témoignage de la foi.
L’an dernier j’ai été frappé par le contraste dans la manière dont les enfants ont témoigné de leur foi. Ils vivent dans deux pays différents, l’Inde et la Chine, mais ils sont tous francophones. En Chine en toute évidence, témoigner de sa foi à l’âge de 10-12 ans semblait ridicule, voire saugrenu. Alors qu’en Inde les enfants parlaient de leur foi bien plus naturellement. Les deux situations sont semblables, car, les enfants viennent d’un même milieu catholique, où les parents ont à cœur de mettre leurs enfants en marche sur le chemin d’intégration de la foi en leur indiquant la possibilité d’aller vers l’adhésion personnelle, parce que déjà celle du couple, ou tout au moins de l’un de deux. Et pourtant les comportements sont si différents.
Je me suis donc posé la question de savoir si la différence ne venait pas tout compte fait, essentiellement de l’environnement. L’Inde est un pays où la religion est omniprésente, alors que la Chine ne la respire pas.
A Hong Kong, comme pratiquement partout dans le monde entiers, nous vivons dans monde dit moderne. Moderne veut dire libéré de l’emprise de la religion, de ses rites et se dogmes. Qui n’en rêve pas, même les plus catholiques par tradition ? Et dans une certaine mesure, il y a du bon dans ce rêve, dans la mesure où il démasque les abus d’autorité ainsi exercée qui tente ainsi de supprimer la liberté d’aimer. Mais ce n’est pas seulement pour cette raison que l’homme moderne se rebelle contre une telle présence. Tellement est inscrit en nous le désir de nous réaliser par nous-même et avec nos propres moyens.
Mais aujourd'hui, comme le montre Michel Kubler dans la Croix - qui fut aumônier de la communauté catholique francophone de Bucarest, ce qui lui a d’ailleurs permis d’écrire un livre à ce sujet - (pour dire que) la question n’est pas le fait seul du dogme, mais de la foi en Dieu.
Nous sommes dans un monde qui non seulement n’a pas besoin de Dieu (c’est prouvé, on peut vivre sans lui et même très bien), mais ce monde ne supporte pas qu’il y en ait qui y croient. Même si déjà à l’époque du prophète Jérémie, il était difficile voire dangereux de vivre sa foi, à notre époque il en va de même. Un jour j’ai rencontré un missionnaire venu d’Amérique latine pour être missionnaire en Inde. Il m’a raconté cette histoire qui lui est arrivée.
A bord d’un taxi où la représentation de Ganesh était accrochée au rétroviseur, il demande au chauffeur de l’enlever et mettre à la place une croix. Tout en discutant sur la symbolique de ces deux représentation, le chauffeur accepte, mais une fois arrivé chez lui, pas content il se plaint à son entourage que le missionnaire connaissait. La situation fut apaisée et la croix resta toujours là dans sa voiture.
En l’écoutant je me disais, je ne pourrais pas faire une chose pareille, mais je reconnais l’audace du jeune missionnaire. Tout en me disant que je suis certainement capables d’autres audaces qui me sont propres.
Chacun de nous, nous avons à être missionnaire, au sens de témoigner de notre foi. Chacun à sa manière, mais toujours avec cette audace, ce grain de folie qui fait que quelque chose de divin pourra passer à travers un tel comportement. La croix chrétienne, celle dont parle Jésus, est formée de deux lignes qui se croisent. Une horizontale, qui nous est si familière, de par notre condition humaine, et nous relie aux autres humains. Alors que l’autre, verticale, nous relie à Dieu dont Jésus montre la profondeur de l’amour éternel.
Comment donc être fidèle à ce Jésus ? En le suivant sur un tel chemin. Comme il le dit, celui qui ne renonce pas à sa vie, ne le peut pas, il est encombré de quelque chose qui nous retient à nous et qui nous fait tourner autour de nous-même et en vue de nous même. Renoncer à soi-même, c’est renoncer à quelque chose qui nous semble le plus précieux, c’est-à-dire renoncer à notre propre volonté. Et la foi chrétienne est en contradiction évidente avec l’esprit du monde. Là où règne l’égoïsme et vaine réalisation de soi, la foi chrétienne tend à mettre au centre la présence de Jésus. Et le défi pour tout missionnaire c’est de le suivre à la croisée de ces deux lignes que forme la croix.
Notre vie sur terre, dans la mesure où celle-ci nous amarre à cette vie sans être disponible à l’autre vie, est crucifiée pour être vouée à la vie en Dieu. Demander à Dieu le don de la foi et de la confiance pour pouvoir porter la croix c’est bien basique. Le monde a besoin de vrais témoins qui n’ont pas peur d’être ainsi crucifiés entre les exigences du monde et aspirations spirituelles, divines qui de toutes façons auront le dernier mot, le mot d’Amour pour chacun d’entre nous. Etre missionnaire c’est porter une telle espérance avec soi là où on est.