2008/09/28 - Dix ans de Rencontres musicales à la Collégiale Saint-Martin
Bonsoir !
Quelle joie, quelle émotion, de nous retrouver ce soir dans ce couloir de la vie. Yannick m'a passé la commande, très honoré je me suis employé de mon mieux pour être le porte voix de la joie de nous tous. Aux introductions que Yannick souhaitait pour chacune des trois parties dont est composé le programme, s'ajoutent dans la première partie seulement ces quelques introductions des extraits du Chemin de Croix que nous avons réalisé ensemble, il n'est pas difficile de deviner qui a fait la musique et qui les paroles. Cela a d'ailleurs donné lieu à l'existence de la nouvelle tradition de concerts-méditations que nous réalisons ensemble depuis déjà plusieurs années.
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INTRODUCTION :
La musique n'empêche pas de réfléchir, mais assurément invite à méditer. Car toutes les pensées libres et quelque peu vagabondes, sont reprises en main - et quelles mains, sans parler des pieds - comme une gerbe de fleurs des champs qui au gré du vent se sont fichées en terre pour en donner un joli tapis bariolé, un par-terre.
Je voudrais donc partager avec vous ce que j'ai reçu grâce à sa musique.
I. LITURGIE.
Tout d'abord dans sa majesté liturgique lorsque la toccata tombe du ciel avec la fougue que l'on lui connaît : Puer natus est et j'entrevois le sourire et en Si majeur de l'Eternel. C'est à la fois par et pour lui, et tant mieux et même pour la vie, un chemin de foi tout autant que celui de la Croix.
Combien de fois j'ai vu, avec mon regard bien peu discret sans doute, mais toujours dans mon objectif, la Véronique venir essuyer le visage de Yannick. Je sais que sa femme c'est Catherine, mais enfin vous avez compris, c'est de la Véronique du Calvaire que je parle et non pas d'une compagne de vie.
Après Véronique des grosses œuvres auprès de la victime pascale, vient la Donna nobis pacem, toute souriante, toute détendue, toute attendue aussi par qui ? étonnant que cela puisse paraître, attendue par la sainte paresse.
" Tout est paix, tout est joie " mais pas tout le temps, et pas pour longtemps, juste de temps en temps.
Et on en prend acte avec l'Ite missa est.
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Ainsi s'achève ce qui ne devait être qu'une toute brève introduction à la première partie et qui, je le sais, se prolongera en une conduite aimante, une induction.
Je résume, pour rester dans le ton : " Puer et Missa sunt ? " c'est une question ! A quoi Yannick répond avec son air bien rangé mais pas mal étonné " Adsum " ce qui veut dire présent et moi je disparais pour me nicher dans le creux de son oreille musicale et partir avec lui en grande cavale.
II. LES RENCONTRES MUSICALES
Les rencontres musicales de la collégiale ont une longue histoire. La présence déjà décabriste (cela sonne bien pour une révolution bien datée, mais je doute du bon choix du mot pour dire la longue vie d'un artiste), donc je reprends, la présence déjà bien longue celle de dix ans de Yannick au perchoir de l'hémicycle céleste, celui qui touche à la croûte terrestre mais pour laquelle l'autre moitié n'est pas en reste, cette présence là nous émeut et rassure.
C'est toute la ville et ses environs avec son élan régulier pour la beauté et du son et du sens qui prend le chemin de la croissance si non de la vie dans sa plénitude, certainement de l'oreille musicale par laquelle croît (du verbe croître, vous pouvez me croire) la bonne amplitude de l'existence heureuse.
Les rencontres avec la Vie (V majuscule, c'est pour lui signifier le respect) telle qu'elle est, telle qu'elle se niche sous les opercules de nos existences fragiles, ces rencontres là se font ici aussi, dans ce lieu ou la musique à sa belle part et même sa part belle. Dans une église ouverte le jour et le soir parfois, avec pour fond musical, s'y trouvent ceux qui cherchent et ceux qui ne cherchent pas. Mais pourquoi les distinguer ? Vous voyez cette habitude quasi-cartésienne de vouloir mettre en catégories, comme l'organiste met les notes dans les tubes et d'où sortent des sons, mais lui il le fait pour une sinon agréable, tout au moins grave, car parfois furibonde, harmonie. Or, tous ceux qui y entrent cherchent quelque chose de plus ou moins personnifié.
Mais, assez de paroles, assez de vagabondage verbal, nous sommes ici pour la musique et les voix enchantées qui se démultiplient dans ses instruments et que personne ne pourra instrumenter pour son compte, et peut importe si c'est pour ou contre.
Conduis-moi douce lumière avec l'Ave Maria pour chœur.
III. AU SOIR DE LA VIE.
Un soir d'automne d'hiver même, sûrement, d'ailleurs qui les distingue ? on ne les distingue guère maintenant, sous le coup de minuit, enfoncé dans ma capuche anti-vent, anti-vol, anti-bruit, anti-pluie, anti-les objets non identifiés mais bien réels et bien volants, en me faufilant entre les voitures qui longent la collégiale, c'est par une tempête encore plus forte que celle propagée par les éléments naturels, que je suis abasourdi et par là sorti de ma torpeur.
En transperçant les fenêtres, que dis-je, les vitraux, les murs même, des vibrations identifiées de façon sonore, donc de la musique provenant des tréfonds de la collégiale se déversait dans mes oreilles. Une véritable bourrasque comme si l'Etat Major d'une puissance étrangère mettait à exécution le plan de sauvetage quelconque appelé : tempête du désert.
C'est alors que j'ai compris qu'au creux d'une nuit pleine de dangers pouvait me guider vers le havre de la paix la musique qui vient de l'intérieur.
Dans le fracas des sens, je reprends mes esprits et je me dis: pourquoi devoir toujours parler des bruits, sont-ils les seuls qui tombent sur la terre ? Voici donc la troisième tierce, celle de Made in France, en passant par Stuttgart, Cracovie et Anvers.
C'est une moissonneuse-batteuse croisée avec une concasseuse qui est prête à déverser ses versets peu antalgiques pour la plus grande joie des bourreaux de la matière molle et du papier pré-mâché des discours qui se prennent pour du granit dans les gants de velours. C'est dans l'intimité de ce monstre hybride que vont se déverser en flux parricide toutes les déjections de la terre et de son environnement : ne cherchez pas le sens de ce travail, il n'y a que la machine qui compte le reste vaille que vaille. La furie de Léviathan, version industrialisée et à cette occasion militarisée, ne nuit qu'à ceux qui se prennent pour quelqu'un au lieu de n'être que quelque chose. C'est comme le tabac, l'alcool etc. le désir de vouloir être quelqu'un nuit à la santé.
A vrai dire j'ai hésité sur le choix de l'orthographe du verbe, n'être, ou naître dans les deux cas correct, mais n'être ou naître ce n'est pas grand chose comme différence, car à l'oreille il n'y a pas vraiment de différence, à l'oreille peut-être, mais pas pour la langue et donc pour la communication entre les êtres humains, car naître et pourtant ne pas être, qui en voudrait ? Personne, c'est par ailleurs, l'humour de la langue française, le mot " personne ", veut dire quelqu'un et son contraire.
En polonais par exemple, c'est différent. Le mot " personne " se dit OSOBA : qu'est-ce que tu pourrais dire de toi-même, o sobie.
Et en français, qu'est-ce que vous pouvez dire au sujet de vous-mêmes ; et vous entendez la réponse : je suis une personne. Il est quelqu'un et personne.
Avec le deuxième mouvement du Made in France c'est pareil. Quelle beauté mélodique qui prend son envol, mais chaque fois quand la mélodie prend son envol, brusquement elle s'arête, comme si les musiciens lisaient les notes de musique sur un papier incomplet, dont on en a arraché un morceau. Mais la musique se poursuit par delà des notes jouées… et devient autrement audible. La musique est quelqu'un et personne, elle est présence et silence, elle est invitation et inachèvement.
Je crois qu'il faut que j'arrête, j'abrège et j'achève…
Mais, attention ça va vibrer, concasser, broyer, dejecter, sans abjecter (ce deux derniers verbes sans être au préalable appelés à l'existence académiquement autorisée ne le sont par moi que pour cette circonstance), déjanter en somme… Nous entrons dans le rythme de la musique de la Terre en lutte avec son bien contre son mal qui comme un fugitif l'harcèle et qui râle.
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Décidément, la musique n'empêche pas de réfléchir, mais assurément elle invite à méditer…. Et c'est alors qu'elle vient de l'intérieur !
R. Kurowski
Programme musical:
* Introduction à la première partie (orgue seul)
- Toccata sur tableaux d' une exposition
- Jésus tombe pour la première fois (ext chemin de croix)
- Pastorius toccata
- Jésus rencontre sa mère (ext chemin de croix)
- Toccata sur Puer Natus Est
- Une femme éssuie le visage de Jésus (ext chemin de croix)
- Toccata sur Victimé Pascali
- Agnus Dei, Donna nobis pacem (ext messe d' orgue)
- Toccata sur Ité Missa Est (ext messe d' orgue)
* Introduction à la seconde partie (orgue et ensembles)
- Conduit moi douce lumière, fantaisie pour flûte ( F. Detton), alto
(Bénédicte Detton) et orgue
- Ave Maria pour choeur (Chorale à choeur joie), orchestre
(Orch. à corde d'Enghien- Montmorency) et orgue
dir: François Detton
* Introduction à la dernière partie (orgue et batterie)
- Made in france
- Ballade
- Chaconne en sol
- Hommage