2014/08/22 - Homélie - Funérailles de Christian
Chers Aurore, Cyrille, Claire et Marie !
Chère famille et amis de Christian !
C’est dur la vie, perdre son père, son époux, son enfant..., son ami : plus rien comme avant. Plus rien comme avant avec des questions :
POURQUOI ?
Avec des constats : Papa me manque ! et même le sentiment d’une grande colère.
Face à la mort tout notre être est engagé, toute notre vie est sollicitée. On peut s’en défendre, mais l’on ne peut pas l’éviter. Elle nous parle différemment à 10 ans, à 20, à 40, 75 ans etc. Elle nous parle des limites de notre vie, de sa fragilité, des dangers qui la guettent.
TROP TOT !
Même si pour tout être aimé le départ de son proche est ressenti comme une injustice, souvent l’on peut se donner de plus ou moins « bonnes raisons » pour justifier une telle séparation. Mais à 50 ans, en pleine force de l’âge, alors que les enfants sont encore petits...
Cyrille et Aurore ! vous le savez, mais permettez-moi de le dire devant tous ses amis et vos amis. Papa était très fier de vous ! Il désirait vous accompagner le plus loin possible sur le chemin de votre vie vers la vie adulte. Sa dernière sortie, alors qu’il était déjà bien malade, n’était-elle pas pour aller à l’école pour rencontrer vos éducateurs ?
TROP TOT pour vous Claire qui avait construit patiemment et durablement une vie de couple et de famille.
TROP TOT pour les collègues de travail et amis avec qui tant de passions professionnelles restaient à partager.
VOIR AILLEURS
Le choix de vivre à l’étranger était lié à son envie de voir ailleurs. Le besoin de ne pas se laisser enfermer dans quelque chose d’étriqué, avec un horizon pas assez large. Certes, l’on n’a pas besoin d’aller très loin pour voyager au sens de rencontrer de nouvelles personnes et de communiquer c’est-à-dire donner et recevoir, apprendre et faire apprendre. Déjà Christian était de ceux-là ! Mais sa disponibilité, sous des airs au premier abord un peu sévères pour un échange a toujours été totale. Et elle s’exprimait aussi dans le fait d’aller ailleurs. Très sérieux dans le travail, il savait tirer les câbles sous-marins de tant de communications. Et il y veillait, il veillait à ce qu’ils fonctionnent comme prévu.
MAIS TOUJOURS LA FAMILLE AU CENTRE
Si son travail l’occupait beaucoup durant cinq jours de la semaine, il restait disponible à la famille les deux autres. Il pratiquait donc 5+2=7. Et dans tout ceci il était
VEILLEUR : sur la vie de ses proches, sur des projets professionnels, sur le développement personnel, celui de ses proches (au sens le plus ouvert du terme)
Que sa manière d’ouvrir une bouteille de vin me sert d’illustration. Je l’ai vu jubiler dans ces moments. Et bien sûr, sa joie de voir libérer une bouteille de son arôme, exprimait chez lui, la joie de pouvoir libérer le potentiel qu’il savait déceler chez son conjoint, son enfant, chez son collègue de travail, chez son ami. Libérer chez l’autre ce qu’il y a de bon en lui et le faire avec toute connaissance de l’art de savoir ouvrir une bouteille et surtout savoir verser le vin dans le verre. (sûrement pas comme on verse du coca !)
Un serviteur de l’Evangile est celui qui veille, qui veille sur l’essentiel, désigné sous le nom de maître qu’un serviteur attend.
Un serviteur de la vie, Christian l’a été avec aussi sa capacité de mise à distance : par le fait de savoir tourner en dérision ce qu’il considérait comme vanité. Il s’en méfiait pour lui-même, il la désignait chez les autres. Doué d’une perspicacité rare, la dérision sinon le silence complet, étaient ses armes pour réagir au monde qu’il percevait de la sorte.
Christian était un veilleur qui voulait voir ailleurs. Mais il le faisait en toute discrétion : comme un animal (âne) qui donne des coups pour se défendre et est solide, comme un mulet qui buté sait tenir le cap.
Christian !
Les plus proches savent que tu voulais faire une marche sur les routes de saint Jacques de Compostelle. Dans votre chambre, accrochée au mur la croix du Christ que l’on t’a offert pour ta première communion et le magnifique auto portrait de ton grand-père. Avec ta foi intellectuelle qui ne supporte aucune hypocrisie, heureux d’avoir été marié à l’église et les enfants baptisés, par ta mort comme par ta vie tu deviens un passeur de la VIE que nous célébrons aujourd’hui.
Certes, Cyrille et Aurore auraient aimé que tu leur apprennes encore tant et tant de choses. Ils auraient aimé t’admirer de ton vivant, à leurs côtés. Et Claire de pouvoir compter sur toi pour continuer à partager la vie à deux et en famille. Et nous tous de pouvoir partager des moments de bonheur simple, celui de travail ou de repos.
Toi qui aimais lire, tu nous laisse le livre de ta vie fermé. A nous de continuer à écrire le nôtre en prolongeant ta vie dans nos vies.
Christian, nous te confions maintenant à Dieu, car comme tu aimais dire : « Dieu reconnaîtra les siens ». Et tu en fais partie. AMEN.